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Édouard Turquety
Rosa Mystica
Ô jeune rose épanouie
Près du tabernacle immortel,
Vierge pure, tendre Marie,
Douce fleur des jardins du ciel ;
Ô toi qui sais parfumer l’âme
Mieux que la myrrhe et le cinname
Et l’encens même du saint lieu ;
Ô toi dont la grâce est l’empire.
Toi qui ramènes d’un sourire
Le pardon aux lèvres de Dieu :
Mère du Christ, reine de l’ange,
Oh ! laisse tomber jusqu’à nous
Ce rayon pur et sans mélange
Que nous demandons à genoux ;
Cette lumière intérieure
Qui fait que la vie est meilleure
Et le poids du siècle moins lourd,
Lumière féconde en délices,
Où le cœur boit à pleins calices
Les ivresses d’un saint amour !
Hélas ! il est tant d’amertume,
Tant de douleurs à consoler,
Tant d’êtres qu’un chagrin consume
Et qui n’osent le révéler !
Leur existence est si troublée
Que la pierre du mausolée
Brille à leurs yeux comme le port,
Et que, vaincus par la tempête,
IIs ne veulent poser la tête
Que sur l’oreiller de la mort.
Ô Vierge ! écoute leur prière,
Sois indulgente et souris-leur ;
N’abandonne pas sur la terre
Ces déshérités du bonheur ;
Sois leur appui, sois leur patronne,
Que ton bras sûr les environne
Et défende leur doux sommeil ;
Relève, relève, Marie,
Chaque fleur mourante et flétrie
Qui n’a point de place au soleil.
Oh ! s’il est une âme oppressée,
Une femme au cœur innocent,
Qui garde un nom dans sa pensée
Et qui pleure en le prononçant ;
Oh ! verse l’espoir sur cette âme
Vacillante comme une flamme :
Dis-lui qu’ailleurs on s’aime mieux
Dis-lui qu’elle a toujours un frère,
Et que, séparés sur la terre,
Ils seront unis dans les cieux.
Tends à l’exilé qui t’implore
Un ciel plus calme, un jour plus beau,
Et comme un reflet de l’aurore
Qui souriait à son berceau ;
Tends à l’orpheline égarée
Un peu de cette paix sacrée,
Trésor d’en haut qu’elle n’a plus :
Adoucis le fiel de ses larmes,
Et dans un songe plein de charmes
Fais-lui voir ceux qu’elle a perdus.
Et puis sur cette route amère
Où Dieu sème tant de combats,.
S’il était une pauvre mère
Dont le seul fils ne revînt pas,
Soutiens dans sa longue détresse,
Soutiens l’enfant de sa tendresse
Qui marche avec peine et lenteur :
Vierge sainte, Vierge divine,
Ne laisse pas croître l’épine
Dans le sentier du voyageur.
Et nous qu’un regret suit encore,
Quand nous tu supplions bien bas.
Au nom de ce Christ qu’on adore
Et que tu berças dans tes bras,
Ô Vierge ! ô toi qu’un regret touche.
Laisse descendre de ta bouche
Un langage délicieux :
Ô rose ! entr’ouvre tes corolles,
Et tes parfums et tes paroles
Nous feront respirer les cieux !