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Jean de La Fontaine
Le Pan se plaignant à Junon
Le Pan se plaignoit à Junon.
Deesse, disoit-il, ce n’est pas sans raison,
Que je me plains, que je murmure ;
La chant dont vous m’avez fait don
Déplaist à toute la nature :
Au lieu qu’un Rossignol, chetive creature,
Forme des sons aussi doux qu’éclatans,
Est luy seul l’honneur du Printemps.
Junon répondit en colere :
Oyseau jaloux et qui devrois te faire ;
Est ce à toy d’envier la voix du Rossignol ?
Toy que l’on voit porter à l’entour de ton col
Un arc-en-ciel nué de cent sortes de soyes,
Qui te panades, qui déployes
Une si riche queuë, et qui semble à nos yeux
La Boutique d'un Lapidaire ?
Est-il quelque oyseau sous les Cieux
Plus que toy capable de plaire ?
Tout animal n’a pas toutes proprietez.
Nous vous avons donné diverses qualitez,
Les uns ont la grandeur et la force en partage ;
Le Faucon est leger, l’Aigle plein de courage,
Le Corbeau sert pour le présage,
La Corneille avertit des mal-heurs à venir :
Tous sont contens de leur ramage :
Cesse de te plaindre, ou bien pour te punir
Je t’osteray ton plumage.