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La méningite peut être éliminée
Seth Berkley, ancien directeur général de Gavi, et Samba O. Sow, ancien ministre de la Santé du Mali, joignent leurs voies pour appeler les autorités sanitaires à l’action.
La méningite bactérienne à méningocoques est une maladie mortelle liée aux températures fortes, à la poussière en suspension dans l’air, et aux conditions de vie surpeuplées, facteurs que le changement climatique menace d’empirer.
On estime qu’elle a causé 250 000 décès en 2019, faisant d’elle une des infections les plus meurtrières chez les jeunes enfants. Pour les survivants, elle peut entraîner des lésions cérébrales et une perte auditive.
La méningite peut apparaître n’importe où et n’importe quand. Mais elle touche de manière disproportionnée la ceinture de la méningite, qui s’étend sur 26 pays d’Afrique et abrite des centaines de millions de personnes.
Chaque année, cette région connaît chaleur et poussière propices à la propagation de cette maladie ; tous les 5 à 12 ans, des épidémies dévastatrices en résultent.
La bonne nouvelle ? La méningite peut être vaincue. Nous le savons parce que dans la ceinture de la méningite, nous avons déjà réussi à éliminer la cause la plus courante de cette maladie : la méningite A. Aucun cas n’y a été signalé depuis 2017.
À l’occasion de la Journée mondiale de la méningite (le 5 octobre), nous devons continuer à faire progresser ce succès remarquable en suivant la feuille de route de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui définit les mesures à prendre pour éliminer la méningite en tant que menace pour la santé publique d’ici 2030.
Mais pour y parvenir, nous devons agir ensemble et consacrer les ressources nécessaires afin d’empêcher l’apparition de nouveaux cas et de nouvelles flambées.
Pour ce, il faut notamment utiliser les vaccins les plus modernes, investir dans le diagnostic, le traitement et la surveillance, et faire tout notre possible pour soutenir ceux qui survivent à l’infection.
En agissant ainsi d’ici 2030, nous pouvons éviter près d’un million de décès et protéger 800 000 personnes des séquelles de la méningite.
Commençons par la prévention. Nous avons aujourd’hui des vaccins qui protègent contre la méningite bactérienne. C’est d’ailleurs le déploiement à grande échelle de MenAfriVac®, un vaccin mis au point par le Projet Vaccins Méningite (un partenariat entre L’OMS, le Serum Institute of India, et PATH) qui a permis d’éliminer la méningite A dans la ceinture de la méningite.
Alors que d’autres souches de méningite sont en hausse et pourraient s’installer dans la niche écologique autrefois occupée par la méningite A, nous avons de nouveaux outils à notre disposition pour les contrer.
Le vaccin MenFive® par exemple, qui protège contre un plus grand nombre de méningocoques, a reçu la préqualification de l’OMS. Le groupe stratégique consultatif d’experts (SAGE) de l’OMS a d’ailleurs recommandé son utilisation dans la ceinture de la méningite, encourageant les pays concernés à adopter ce nouveau vaccin.
Le Nigeria, avec le soutien de Gavi, l’Alliance du Vaccin, montre déjà la voie en devenant le premier pays à utiliser le MenFive® pour mener une campagne de vaccination contre une épidémie de méningite. Maintenant, le pays envisage même d’introduire ce vaccin plus systématiquement pour prévenir des poussées de cas futurs.
Pour éliminer la méningite à méningocoques A, il a fallu déployer des efforts de vaccination dans 24 pays de la ceinture de la méningite. Pour sauver davantage de vies, il est donc nécessaire de mener une campagne toute aussi complète avec un vaccin qui offre une couverture plus large contre des souches de plus en plus nombreuses.
Si la prévention est une étape importante, elle n’est cependant pas la dernière. Les diagnostics et les traitements antibiotiques rapides sont essentiels pour lutter contre la méningite qui peut tuer en 24 heures.
Des outils pour identifier la maladie sont disponibles, mais ne sont pas sans limites; surtout dans les environnements à faibles ressources que l’on trouve dans de nombreux pays de la ceinture de la méningite, où les professionnels de la santé n’ont pas toujours accès aux moyens ou formations nécessaires.
Des tests plus abordables, plus simples et plus rapides sont indispensables pour sauver le plus grand nombre de vies possible.
Au-delà du diagnostic, la méningite bactérienne se traite avec des antibiotiques ; mais ceux-ci ne sont pas toujours disponibles ou appropriés pour chaque infection.
Des directives thérapeutiques actualisées sont nécessaires, notamment en raison de la menace grandissante que représente la résistance antimicrobienne à l’échelle mondiale.
En outre, il est nécessaire d’améliorer la surveillance pour remédier à un manque d’informations chronique sur la propagation de la méningite.
Enfin, nous devons aider à soigner les survivants, dont un sur cinq vit avec des séquelles graves telles que des lésions cérébrales ou des pertes auditives ou visuelles.
Aujourd’hui encore, les soins de réhabilitation sont souvent indisponibles ou peuvent requérir un coût excessif. Les professionnels de la santé doivent être formés et équipés pour aider les survivants à reprendre leur vie.
Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour éliminer la méningite d’ici 2030. Mais heureusement, nous savons que nous pouvons le faire. (SciDev.Net)