Library / Literary Works |
Paul-Jean Toulet
Coples
I
Le sable où nos pas ont crié, l’or, ni la gloire,
qu’importe, et de l’hiver le funèbre décor.
Mais que l’amour demeure, et me sourie encor
comme une rose rouge à travers l’ombre noire.
II
Toi qui blessas Vénus, ah, si Vénus te blesse,
Diomède, bénis sa force, et sa faiblesse.
III
Tant de travail, docteur, pour découvrir enfin
que l’être se nourrit, et meurt de pourriture ?
Ah ! Cesse, à tes fourneaux, d’avilir la nature :
ce n’est que songe et fleurs dont nos âmes ont faim.
IV
Quoi, c’est vrai, tu m’aimas, qui de moi fus aimée ?
Amour, divine flamme ; amour, triste fumée…
V
scarabée amoureux, qu’un enivrant délice,
et la rose brûlée aux feux de messidor
captivent, tu n’es pas, ni dans cette ombre d’or,
le premier qu’on ait vu mourir d’un beau calice.
VI
Que ce fut douce, hélas ; que c’est lointaine chose,
votre jupe bleu−lin, et ce transparent rose.
VII
Hélas, rien ne varie ; et quoi qu’on ait coutume
d’en dire, tout est comme à son commencement.
Les fruits n’ont pas changé d’odeur, ni mêmement
les femmes de mensonge, ou Thétis d’amertume.
VIII
Mopse prétend pécher contre l’esprit : c’est être
bien fat. Pour l’offenser, il faudrait le connaître.
IX
Tel qui soula de sang ses rêves et son fer,
aujourd’hui pardonné, son opprobre s’efface.
C’est ainsi que sur nous Dieu fait tonner sa grâce.
Ne force pas qui veut les portes de l’enfer.
X
Vénus hait le soleil. Sous le couvert éclose,
jadis à son coeur noir m’enivrait une rose.
XI
Lorsque Timour partit avec sa femme en croupe
d’un cheval comme lui boiteux mais fier encor,
son épée à ton coeur subtil battait d’accord,
Daoude aux longues mains. Et tu portais sa coupe.
XII
Bénarès, dont le nom est rempli de parfums,
je n’ai vu, sur tes bords, fumer que trois défunts.
XIII
Qu’importe si l’automne a fané le séjour
où nous avons brûlé, Faustine, aux mêmes flammes.
Je sais d’autres secrets pour endormir les âmes ;
et ma chambre de nacre irise encor le jour.
XIV
L’amour n’est plus. Le jour viendra−t−il que j’oublie,
nouvel et noir venin, ta puissante folie ?
XV
Boy, une pipe encor. Douce m’en soit l’aubaine
et l’or aérien où s’étouffent les pas
du sommeil. Mais non, reste, ô boy : n’entends−tu pas
le dieu muet qui heurte à la porte d’ébène ?
XVI
Tout autour de la lampe à deux fois rallumée
les papillons d’émail sont ivres de fumée.
XVII
Quand les os sont pareils à des roseaux légers ;
l’heure, comme une flûte au bord de la prairie :
pavots de pourpre, ô vous dont l’ombre s’est fleurie,
défendez−nous du jour et des pieds étrangers.
XVIII
Brouillard de l’opium tout trempé d’indolence,
robe d’or suspendue aux jardins du silence.
XIX
Invisibles regards qu’on sait qui nous verront,
fumée où se dérobe une présence abstraite,
les flambeaux ont noirci. Quel mystère s’apprête,
qui met une sueur d’épouvante à mon front ?
XX
La dure alcôve au bénarès est parfumée,
à s’y pourrir le coeur. Venez, ô bien−aimée.
XXI
Dans ce charnier d’amants qu’a dévorés la Chine
où tu glapis ton coeur sur leurs os corrompus,
n’es−tu pas lasse encor d’opium ni de pus,
hyène jaune, à qui frémit sa haute échine ?
XXII
O nuit parmi les nuits de laque et de vermeil,
es−tu l’aurore, −ou les degrés d’un noir sommeil ?
XXIII
— " contemple un autre monde " a chuchoté la fée,
cependant que les murs s’entr’ouvraient devant moi,
découvrant Londre aux ombres d’or, son triste émoi,
et la pendante Hécate, au ciel, sanglant trophée.
XXIV
On dirait une main qui chiffonne un linceul.
Qui donc vient de parler tout bas ? Serais−je seul ?
XXV
Cette averse, Badoure, où ma langueur balance
à t’émouvoir, s’éloigne ainsi qu’un messager.
écoutes−en tarir le battement léger
dans nos coeurs, et l’amour s’enchanter de silence.
XXVI
Quoi, nul amour encor ne t’enseigna ses veilles,
paradis que n’ont pas animé les abeilles ?
XXVII
Admire des glaïeuls l’écarlate pointu,
et, sous le noir cyprès, cette glycine encore.
ça, c’est un ibiscus, dont le coeur se décore
d’une touffe d’or vert. C’est vrai : pourquoi ris−tu ?
XXVIII
Toi qu’arment les pavots de leur sombre vertu,
Karahissar, Karahissar, que me veux−tu ?
XXIX
Paradis d’ombre fraîche et de chaleur extrême,
où murit la grenade, et, non loin du jasmin,
cette double pastèque agréable à la main :
Badoure, il n’est jardin que des fleurs où l’on aime.
XXX
Madame, qui l’eût dit que dans vos bras habite
amour si tristement et subie, et subite ?
XXXI
Je me rappelle un jour de l’été blanc, et l’heure
muette, et les cyprès… mais tu parles : soudain,
je rêve, les yeux clos, à travers le jardin,
d’une source un peu rauque, et qu’on entend qui pleure.
XXXII
Stendhal, si revenait ta blonde Chastellux,
mes crayons à la peindre en deviendraient poilus.
XXXIII
— tout ce réseau, cette ombre, invisible séjour
d’un amour que trahit ton sourire et ta robe nous cache…
— mainte fleur au regard se dérobe, ami.
— plus d’un corail rougit au loin du jour.
XXXIV
C’est la R H Ellen De Northeambrie,
qui m’avait fait cadeau de ce mouchoir de poche.
XXXV
Presque une enfant encor, mais déjà grande et belle,
je vis un jour ses pleurs, par l’orgueil retenus
à force rejaillir, comme les joyaux nus
que fait naître le fer, d’une source rebelle.
XXXVI
J’adore les magasins du passage Choiseul,
c’est un véritable divertissement pour l’oeil.
XXXVII
Arc vermeil, mais des arcs le plus lâche en sa corde.
Ignorant à me vaincre autant que de plier
sous la flèche qui chante, ah, traîne ta discorde
de la maison Tellier à la maison Sohlier.
XXXVIII
Augagneur va parler. France est à la campagne :
nous n’aurons aujourd’hui ni Colbert, ni Montaigne.
XXXIX
Tu m’avais dit : " je t’embrasserai, si tu veux,
dans le parc. " je suivis, sous la basquine blanche,
tes pieds vifs. Dans l’air d’or, où sonne un beau dimanche,
des papillons volaient autour de tes cheveux.
XL
— Agnès, pleurer ? Dit Charle. Oui, quand à Marly mouille
ra la pluie. Il faudrait…
— boire ! Dit la Trémoïlle. −
XLI
la mer étincelait ainsi qu’une gitane
sous ses volants d’azur où scintille le fer ;
et tu m’as dit : " que je suis lasse de la mer.
Venez : l’heure est plus douce à l’ombre du platane. "
XLII
heure céruléenne, et vous, regards couverts :
émeraude fondue, aden, de tes soirs verts.
XLIII
Toi dont pendent les fleurs au rivage de Loire,
jardin harmonieux, que je hais la forêt
noire et verte, et des bois où le faune apparaît
l’épouvante cachée à l’ombre de leur gloire.
XLIV
Jardin qu’un dieu sans doute a posé sur les eaux,
Maurice, où la mer chante, et dorment les oiseaux.
XLV
Alger, ville d’amour, où tant de nuits passées
m’ont fait voir le henné de tes roses talons,
tu nourrissais pour moi, d’une vierge aux doigts longs,
l’orgueil, et l’esclavage, et les fureurs glacées.
XLVI
Salut, côte−rotie, et toi, rouget trilibre,
qui remplissez le ventre, en laissant le coeur libre.
XLVII
Dolhia, au poète Fô.
ces arondes de jade, et l’or qui les emmanche
dans mes cheveux−qu’un soir ton amour délia,
je te les donne en souvenir. Quand il y a
du brouillard, il les faut polir avec ta manche.
XLVIII
En l’an 1910 de phrases−et du Christ,
nous nous sommes, ma chère enfant, beaucoup écrit.
XLIX
Sous le soir jaune et vert nous ne reviendrons pas
le long du chemin creux qui penche vers Bilhère,
Faustine. Ni, du bois embelli de bruyère,
l’argile n’a gardé la forme de tes pas.
L
De faire amant ensemble, ah, c’est un doux barême :
la fille couche avec, et la mère les aime.
LI
Le mardi gras, ni toi, ni moi, nous n’étions gais.
Des carreaux où du ciel le jour semblait descendre
sur notre âme, on eût dit qu’il pleuvait de la cendre :
— " ah, ah ! T’écriais−tu parfois en portugais.
LII
Mopse, pour tous émoluments, longtemps vécut
de coups de pied au cul.
LIII
Voici que j’ai touché les confins de mon âge.
Tandis que mes désirs sèchent sous le ciel nu,
le temps passe et m’emporte à l’abyme inconnu,
comme un grand fleuve noir, où s’engourdit la nage.
LIV
sur une statue de Michel−Ange.
esclave, mais non pas de l’homme, et qu’au matin
à peine de ta vie, accable le destin.
LV
Tu as beau me parler de vieillesse, ah, que n’ai−je
pareil déclin. Mais toi, dessous tes cheveux blancs,
on dirait, à ton coeur grave et tes gestes lents,
d’un roseau qui s’incline, où pèse un peu de neige.
LVI
sur un portrait de Madame Récamier.
Madame Récamier. Pour un sourire d’elle
on vit Chateaubriand cesser d’être infidèle.
LVII
Ces moires dont zéphire incline la prairie,
ou si quelque déesse invisible a passé,
ainsi courait Camille. Ainsi passa Marie :
sur l’herbe et dans mon âme, ô méandre effacé.
LVIII
sur la halte de chasse de Van Loo.
on rit, on se baise, on déjeune…
le soir tombe : on n’est plus très jeune.
LIX
Cette fraîcheur du soir, qu’on dirait que tamise
une émeraude, a fait se joindre tes genoux,
et tu sembles moins nue ainsi. Mais, entre nous,
ton mari te dirait : " comme vous voilà mise. "
LX
sur un tableau de Vinci.
ah, mon frère aux beaux yeux, ce n’est pas sans douceur,
ce n’est pas sans péril, que tu serais ma soeur.
LXI
Elle est noire, c’est vrai. Corail ni jameroses
ne rient dans sa figure, où l’or non plus des blés.
Mais, les charbons sont noirs comme elle. Allume−les :
on dirait un buisson de roses.
LXII
Eh, jeûnes à ta faim d’aimer si le déboire
te suffit. Mais c’est être fou de ne plus boire.
LXIII
Dessous le flamboyant qui couvre l’herbe nue
d’un dôme violet, où je vous vois encor
fraîche comme l’eau vive en un brûlant décor,
Jeanne aux yeux ténébreux, qu’êtes−vous devenue ?
LXIV
Que je t’aime au temps chaud, la soeur et bientôt mûre
d’un fruit couleur de feu sous la verte ramure.
LXV
Ne crains pas que le temps sçache les cieux briser ;
ni qu’en ses mains varient les fleurs ou les empires.
Rien ne change. Le même lys tu le respires
qu’autrefois Cléopâtre, −et le même baiser.
LXVI
Deux vrais amis vivaient au monomotapa
… jusqu’au jour où l’un vint voir l’autre, et le tapa.
LXVII
le lys.
le divin parfum de Chine emplissait la chambre.
Soudain, secouant les pleurs de l’hiver mouillé,
tu parus, Faustine. Ah ! Que n’est−ce encor décembre,
et toi, hors de ton linge épars, lys effeuillé.
LXVIII
Sous ta paupière bleue, Albe, ton regard d’or :
tel palpite l’éclair aux nuits de messidor.
LXIX
Des bords du canal noir où tu quittas ton linge,
le noir tchocra te guette avec des yeux luisants,
Floryse. Au loin blanchit la mer sur les brisants,
parfois sur Chamarel on voit passer un singe.
LXX
Va, laisse notre amour en paix : du feu de joie
mourant, n’agite pas la cendre qui rougeoie.
LXXI
Il m’en souvient : ta robe claire dans l’allée.
Le fleuve dont le soir éclairait le détour
— tel un sabre, la nuit, qui brille−et sous la tour,
cette sinistre voix au vent du nord mêlée.
LXXII
Il n’est plus, ce jour bleu−ni ses blanches colombes−
ce jour brûlant, où tu m’aimas parmi les tombes.
LXXIII
Mère d’un seul amour, ô Vénus Uranie,
je te sacre d’un bras d’onze lustres glacé,
ma coupe, et cette lyre où chanta l’Ionie,
et le style d’or pur qui mon rêve a tracé.
LXXIV
O femmes, dites−moi, dans la nuit qui passez,
ce qu’à travers vos yeux pleurent les trépassés.
LXXV
Vieillesse, lendemain d’amour, tristes ébats…
sur les carreaux d’azur rampait la fleur du givre.
Un arlequin caduc pleure. Est−il las de vivre ?
Va, nous dormirons tous. Mais les lits, c’est plus bas.
LXXVI
Filles de la fumée, à qui l’aube décente
rougit de voir le jarret nu, la main pressante.
LXXVII
Le soleil se levait dans un ciel sans nuage.
L’aube aux tendres couleurs se mirait dans les eaux
un râle épouvanté courut dans les roseaux,
qui prit pour un serpent la corde de halage.
LXXVIII
Mon chien s’appelait Tom, et ma chienne Djaly.
Ah, que de noms pompeux méritaient mieux l’oubli.
LXXIX
Spongieux, panaché de bambous, triste, plat,
s’étendait sous nos yeux le delta d’émeraude.
Quelqu’un avait porté du bon yunnam de fraude :
vos regards étaient pleins de rêves et d’éclat.
LXXX
Ciel ! Isadora Duncan
va danser. F… ons le camp.
LXXXI
Comme je lui levais sa jupe, curieux
de voir son bas plus rose où le jarret l’affleure,
— " fumez plutôt, mon cher. Fleurter, ce n’est pas l’heure " ,
me dit−elle immobile, " et soyons sérieux " .
LXXXII
Eh quoi, le monde tourne, et mon bol, et ce livre
que je tiens dans ma main. ô ciel tu es donc ivre ?
LXXXIII
Nous fumâmes toute la nuit. Puis un boy vint
pour ouvrir la fenêtre. Une aurore embaumée
entra, chassant la nuit, les rêves, la fumée.
— " une encor, dit Scilla. ça fera juste 20. "
LXXXIV
sous le ciel noir, j’entends les fruits tomber,
Faustine,
temps n’est plus ni printemps de te chanter matine.
LXXXV
L’ombre, ni le mystère enchanté des fontaines,
et l’éclair noir du merle, ou l’auberge aux murs bas :
je n’ai rien oublié. Non plus quand tu courbas
ce front trop orgueilleux, que paraient deux antennes.
LXXXVI
Telle qu’étincelait sa gorge un soir de fête,
pétris ma coupe. Et puis signe : douris m’a faite.
LXXXVII
nous bûmes tout le jour, un autre−et, le suivant,
dans l’ombre un luth chanta qui disait que l’on m’aime.
Hélas vous varierez, ô Badoure. Moi−même
ne suis−je las d’aimer ? Poussière, et toi du vent ?
LXXXVIII
La demoiselle, de vieillesse, est presque morte.
Elle frissonne encore un peu : le vent l’emporte.
LXXXIX
Ne cherche pas l’amour en dehors de soi−même.
L’infini se mesure à son seul infini,
et la métaphysique en sait moins que Nini
quand au frisson du myrte elle répond : je t’aime.
LXL
Ce qu’il fait, Z a cru longtemps que c’est des vers.
Avez−vous jamais lu de la prose à l’envers ?
LXLI
Je songe aux plats sucrés de ma vieille Detzine,
et du service empire en son jaune marli.
Un lamba madécasse enveloppait mon lit,
sous le pastel usé d’une affreuse cousine.
LXLII
Le bouc et la brebis enfantent le titire.
Mais le musmon, de chèvre et de bélier, se tire.
LXLIII
Le tournebroche à poids qui réglait la cuisine
s’est tu, comme le dur et noir magnolier
où grimpait en chantant ma petite voisine.
L’ombre des cyprès tourne. Est−ce pour oublier ?
LXLIV
Pour un cuino, se mettre à trois, ah c’est beaucoup.
Le bélier seul et toi suffirez à ce coup.
LXLV
La guirlande n’est plus, ni le brun violier,
qu’un arome qui meurt au fond de ton armoire
à glace. Que ne puis−je aussi bien oublier
un acide parfum qui perce ma mémoire.
LXLVI
Toi dont un tendre coeur, sous son ferme corsage,
n’a jamais fait un fol… ah, tu n’es pas bien sage.
LXLVII
Le parc ruisselle encore, où l’averse a passé,
Badoure. Approche−toi. Non, laisse, que je goûte
ce bruit voluptueux d’un orme qui s’égoutte :
tel est le pleur furtif d’un plaisir effacé.
LXLVIII
J’ai connu dans Séville, une enfant brune et tendre
nous n’eûmes aucun mal, hélas ! à nous entendre.
LXLIX
Dans l’océan des nuits où l’oeil plonge et s’enchante
Diane vient laver la poudre des combats.
Et vous, plus nue encore, ô belle, parlez bas :
il n’est voix de la nuit qu’au rossignol qui chante.
C
O Diane, ô nuit pure où chante un rossignol,
O belle, nue et blanche, en ce lit espagnol
CI
dans quelle Inde nouvelle, ou que ce soit demain
endormi ton caprice et ton âme envolée,
a−t−elle su guérir la crueur de ta plaie,
et ce coeur nostalgique où se portait ta main ?
CII
(traduit de Voltaire.)
sous le double ornement d’un nom mol ou sonore,
non, il n’est rien que Nanine et Nonore.
CIII
le roi boit.
(d’après Omar Queyam).
derrière les deux tours qui gardent son manoir,
entre son fou qui raille et sa dame au coeur ferme
le roi boit.
Tout à coup une voix crie : " on ferme ! "
nous tombons. Quelqu’un clôt le couvercle. −il fait
noir.
CIV
étranger, je sens bon. Cueille−moi sans remords :
les violettes sont le sourire des morts.
CV
in memoriam Henry de Bruchard.
ici repose Henry de Bruchard ; si la cendre
dormait, d’un si beau feu. Trahi dans son propos,
France, il tomba, le jour qu’il ne te pût défendre ;
comme un fer suspendu, qu’outrage le repos.
CVI
Gloire aux victorieux. Mais, de celui qui tombe,
laurier, que ton frisson enveloppe la tombe.
CVII
C’est dimanche aujourd’hui. L’air est couleur du miel.
Le rire d’un enfant perce la cour aride :
On dirait un glaïeul élancé vers le ciel.
Un orgue au loin se tait. L’heure est plate et sans ride.
CVIII
Nuit d’amour qui semblais fuir entre deux dimanches.
Tel un grand oiseau noir dont les ailes sont blanches.
CIX
Si vivre est un devoir, quand je l’aurai bâclé,
Que mon linceul au moins me serve de mystère.
Il faut savoir mourir, Faustine, et puis se taire :
Mourir comme Gilbert en avalant sa clé.