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Paul Verlaine
Bibliophobes
I
La Femme, en qui l’on doit mettre tout son amour,
Tout son espoir et toute — au fond — sa confiance,
Néanmoins contriste le cœur, ombre et nuance,
Du bon bibliophile, encor que bien né pour
La paix et le repos promis au jour le jour
À qui du Livre fait un peu sa vie, et lance
Dans ce gouffre ingénu de calme et de silence
Son ancienne fièvre et les faits d’alentour.
La Femme, ange et démon, suivant le vieux distique,
Est naturellement soumise... et despotique,
Et naturellement plaintive et... dure aussi !
Allons donc, allez donc quand, au cœur d’un chapitre
Écrit Dieu sait combien ! imprimé sous quel titre !
Interrompu, ne pas lui dire, enfin : ... Merci !
II
Voilà que tout le long, le long de ce sinet
Que l’on a disposé pour des fins sérieuses,
Et peut-être, l’on n’est plus jeune..., curieuses !
Un insecte, d’ailleurs joli, s’insinuait.
Dans cette œuvre d’un art qui, pour être muet,
Ne s’en montre pas moins éloquent, voix joyeuses
A l’œil, concert des reliures somptueuses,
Dans le Livre en un mot — délicat et fluet,
En argent, qui serait du vif-argent, si mince
Et vif ! Un poisson tout petit, beau comme un prince,
Et d’un trait svelte et pur qu’on ne saurait nier,
En royal manteau blanc tout luisant, onde et flamme :
C’est la Mite. Il faudrait vite écraser l’Infâme,
Mais il est si gentil qu’on devrait l’épargner.